L’ONU a exprimé auprès du chef de la junte en Guinée ses « profondes préoccupations » après la mort de plusieurs personnes lors des manifestations et l’arrestation de nombreuses autres.
Quelques jours avant cette affaire, le 13 décembre 2021, le CNRD avait, dans un communiqué, désavoué son Premier ministre qui avait promis à la Cédéao la mise en place du Conseil national de la transition (CNT) avant le 31 décembre 2021.
Ceci après une intense tractation diplomatique auprès des chefs d’Etat de la Cédéao pour éviter que des sanctions supplémentaires ne soient prises contre le pays.
La mise en place de cet organe législatif, le CNT, avait pourtant été notifiée par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest, dans son communiqué final du 60e sommet des chefs d’Etat de l’organisation, tenu à Abuja au Nigeria le 12 décembre 2021.
« Au lendemain du 60e sommet de la Cédéao, il aurait dû déjà rendre son tablier » , a estimé l’un de ses conseillers toujours en poste.
Le procès des massacres du 28 septembre 2009 que voulait organiser le gouvernement et la détention sans jugement des personnalités du gouvernement déchu d’Alpha Condé sont d’autres sujets qui entraînent des grincements de dents au sein du CNRD.
Leur jugement traîne parce que les preuves entre autres détenues contre certaines de ces personnalités ne sont pas suffisantes pour organiser un procès.
Les faucons de Conakry
Si une personne est souvent citée par le Premier ministre comme son plus grand soutien durant son mandat à la tête de l’exécutif, c’est pourtant bien le colonel Mamadi Doumbouya. Mais certains dans son entourage pèsent beaucoup plus dans les prises des décisions.
Ces derniers voyaient d’un mauvais œil le dialogue politique et les concertations nationales qu’initiait le chef du gouvernement pour qui, « aucune action n’est bonne sans la réconciliation ».
Ils vont jusqu’à l’accuser de précipiter la fin de la transition. Ils réussiront finalement par faire échouer le dialogue politique inclusif en refusant certaines garanties exigées par l’opposition.
En réalité, « Mohamed Beavogui n’a jamais caché son souhait d’avoir une transition courte, apaisée, débouchant sur des élections démocratiques dans une approche inclusive par le dialogue » , a confié un proche de Mamadi Doumbouya avant d’ajouter qu’ »il en avait presque fait des conditions pour son retour à Conakry. Mais en quittant Conakry pour Rome, Doumbouya savait qu’il pourrait ne plus revenir ».
Arrivés au pouvoir par la force des armes depuis près d’un, le colonel Doumbouya et ses hommes de confiance ne cessent d’accumuler les abus de pouvoir.
Il est aussi reproché à Mohamed Beavogui de chercher à collaborer avec la Cédéao, au risque de voir les 36 mois de transition, promis par la junte, diminués de près de la moitié. « Dans ces conditions, il devient impossible pour lui de travailler dans la sérénité » , a confié l’un des proches du Premier ministre.
Beaucoup redoutent en effet que même en proposant 36 mois de transition, le CNRD ne songerait pas à quitter le pouvoir, du moins pas si tôt.
Parmi les durs du CNRD, le nom qui revient souvent est celui du ministre directeur de cabinet à la présidence, Djiba Diakité, un ingénieur en recherche de marchés financiers. Certains le surnomment le vice-président.
Il serait l’ordonnateur de la plupart des nominations à la tête des institutions étatiques : les traditionnels longs communiqués de nomination lus au journal de 20h de la télévision nationale. Le Premier ministre lui aussi apprend certaines des nominations à la télévision tout comme les autres Guinéens.
Le départ de Mohamed Beavogui ouvre donc une nouvelle page d’incertitude politique en Guinée. En témoigne la récente répression des manifestations de l’opposition et de la société civile à Conakry qui a fait officiellement cinq morts.
Ces violences ont contribué à éloigner encore plus Mohamed Beavogui du Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD), voire de la Primature.